Écrit par Florent MARTIN

Cet article est paru dans notre newsletter n°39 en septembre 2008.

Le 20 août 2008, nous avons reçu sur contact@zetetique.fr le mail suivant, avec quatre photos en pièces jointes :

Bonjour,
Un ami à moi m’a envoyé quelques photos prises à Carnon plage. Sur ces photos des ombres apparaissent derrière mes collègues et impossible de trouver une réponse rationnelle. Pouvez-vous m’aider ?
Greg.

Ce cas étant particulièrement intéressant, je le partage avec vous. On peut en effet observer au moins trois choses curieuses :

  • Une ombre mystérieuse surplombe certains personnages,
  • Certains d’entre eux sont partiellement transparents.
  • Des sphères et des traces lumineuses apparaissent ça et là.

Comme ce n’est pas la première fois que l’on fait appel à l’OZ sur ce genre de sujet, le photographe amateur que je suis tentera désormais d’écrire un petit article chaque fois que ses compétences et son emploi du temps le lui permettront, afin de percer publiquement ces énigmes. Le troisième point (les fameux « orbes ») ne sera pas traité ici, mais fera l’objet d’un article à part entière plus tard, tant le phénomène fait parler.

Un bon début : les données « EXIF »

Les photos issues des appareils numériques contiennent des informations qui n’apparaissent pas à l’image, mais qui font partie du fichier. Votre appareil photo sauve ainsi quantité de données qui peuvent être consultées ou utilisées ultérieurement par d’autres programmes, comme la date et l’heure (qui permettent par exemple de classer les photos par ordre chronologique), ou encore tous les réglages de l’appareil au moment du cliché (focale, ouverture, vitesse, sensibilité, programme…). De nombreux programmes permettent d’afficher ces données EXIF in extenso. Windows en affiche certaines, dans les propriétés du fichier (clic droit, puis « Propriétés », onglet « Résumé », puis « Avancé »). Il est important de disposer des fichiers originaux car la plupart des logiciels qui retouchent ou redimensionnent les images suppriment ces données EXIF au moment de sauver le résultat. On perd alors des informations qui peuvent être précieuses pour une investigation.

Voici quelques unes des données EXIF présentes dans les fichiers qui nous concernent :

On observe que toutes les photos ont été faites avec une exposition de 3 secondes, ainsi qu’un flash (sauf la n°2). Or, c’est l’usage simultané du flash et d’une longue exposition qui est à l’origine des phénomènes observés. Ami lecteur (comme dirait Stan), je m’en vais t’expliquer.

L’ombre mystérieuse de la photo n°2

Une fois éclaircie, la photo n°2 se révèle : l’ombre mystérieuse n’est en fait qu’un personnage pris à contre-jour (le flash étant éteint et la lune étant derrière le personnage).

Cet effet de contre-jour est aussi présent dans les trois autres photos, mais cumulé avec un autre effet.

 

L’ombre mystérieuse des photos n°1, 3 et 4

Une petite note technique pour commencer : lors d’une longue exposition (3 secondes dans notre cas), certains appareils permettent de choisir à quel moment le flash doit se déclencher. Les photographes parlent de « premier rideau » pour un flash en début d’exposition, et de « deuxième rideau » pour un flash juste avant la fin de l’exposition. L’appareil utilisé ici est un Pentax Optio S7 (on peut voir la marque et le modèle dans les données EXIF), et ce modèle ne permet pas de choisir le rideau. Le réglage d’usine étant le premier rideau : le flash est déclenché en début d’exposition.

Voyons maintenant étape par étape ce qui s’est très probablement passé :

  • t=0 : le photographe appuie sur le bouton. L’appareil fait quelques mesures et ouvre son iris pour débuter l’exposition.
  • Premier rideau : le flash se déclenche. Il ne porte pas bien loin et n’illumine que le premier plan : les personnages. La lumière réfléchie est capturée par l’appareil.
  • t=200 millisecondes : Le flash s’éteint.
  • Pendant les 2.8 secondes restantes : les personnages se relèvent, pensant que la photo est prise (ils ont vu le flash). Or, l’appareil étant encore ouvert pour capturer les parties sombres de l’image, les personnes maintenant debout se retrouvent en contre-jour, comme dans le cas de la photo 2. Ils créent une ombre plus ou moins floue en fonction de leur mouvement.

Voila d’où viennent ces ombres mystérieuses.

Les personnages transparents

Certaines parties lumineuses de la scène, comme les reflets de la lune sur l’eau, qui étaient masquées par les personnages accroupis, sont révélées après que ceux-ci se soient relevés. Cette lumière va venir sensibiliser la « pellicule » à l’endroit où les personnages se tenaient lors du flash. Les deux scènes vont donc se mélanger, rendant les personnages fantomatiques. On voit bien l’effet sur la photo 3.

Florent Martin

Photos de fantômes… ou pas ?